Virginie Wyss

Aug 18, 20228 min

Comment devenir Observateur des Mammifères Marins (MMO?).

Le métier d'observateur des mammifères marins est un métier niche qui nécessite de l'expérience sur l'eau et des certificats spécifiques.

Je pense qu'être biologiste est en plus mais n'est pas forcément obligatoire.

Je connais des techniciens et des marins qui sont devenus observateurs des mammifères marins.

Le plus important à mes yeux est la passion. Ne faites pas ce métier pour l'argent, les places sont chères et il y a en fin de compte peu d'élu.

Concrètement que faut-il pour devenir observateur des mammifères marins?

- De l'expérience (on dit que 3 ans sont nécessaires, mais cela dépend du contrat et il faut bien commencer un jour).

- Une formation JNCC /BOEM (suivant la région ou l'on travaille d'autres formations sont également requises (Golf du Mexique, Nouvelle Zélande, Canada, Méditerannée etc.)

- Un BOSIET (Basic Emergency Safety Training)

- Un Certificat Médical

- Parler anglais (car les formations et la vie à bord se déroulent souvent en anglais)

- Un budget à investir au début car les cours JNCC sont en moyenne 260 pounds (sans le logement et vols si vous allez sur place), le Bosiet coûte 1200 euros (et ce certificat est à refaire tous les 4 ans), le certificat médical entre 100 et 300 euros à refaire tous les 2 ans ) et vous devrez vous équiper de bonnes jumelles, d'un appareil photo réflexe et d'un ordinateur.

- Etre indépendant

- Être flexible (voir article sur le métier de MMO)

- Ne pas avoir le mal de mer

- Etre ok de vivre en communauté

De l'expérience

Je pense qu'avant de se lancer corps et âme dans ce métier, il faut avoir tester le métier de biologiste marin et travailler dans la recherche. Parce que la formation à un coût et sans expérience il y a très peu de chances que vous soyez pris pour un premier contrat à moins que la compagnie ne soit pas sérieuse, auquel cas, vous pouvez aussi vous faire arnaquer (et ne pas être payé par exemple).

Pour obtenir de l'expérience vous pouvez idéalement travailler dans des associations locales qui sortent en mer pour recenser les mammifères marins. Je pense qu'être guide sur des compagnies de whales watching est aussi un bon moyen de se faire l'oeil sur les différentes espèces marines et d'apprendre à faire des photos.

Certaines associations comme la Swiss Cetacean Society ou Cybelle planète en Méditerannée proposent des semaines d'éco-volontariat pour apprendre le métier de biologiste marin. C'est déjà un avant goût du métier mais à mon avis pas suffisant pour être pris comme MMO.

Souvent on idéalise le fait de regarder la mer et de voir des baleines et des dauphins mais cela implique beaucoup de temps d'attentes, de longues journées et pas mal de prises de données et de travail post mission pour analyser les données, les photos etc.

Ce métier bien que fascinant, n'est pas pour tout le monde et parfois on ne voit rien de la journée, et cela fait aussi partie du travail.

Aussi si vous ne savez pas distinguez une baleine à bosse d'un rorqual commun, il serait bien d'aller dans des destinations ou vous pouvez croiser beaucoup d'espèces comme les Açores, Madères, les îles canaries, le sanctuaire Pelagos en Méditerannée, le Saint Laurent au Québec en été, l'Afrique du Sud, la Réunion etc.

Exemple de mon parcours:

En ce qui me concerne j'ai fait un master en parasitologie et éthologie en Suisse (donc rien à voir) et je me suis formée sur le terrain. En 2012, je me suis organisée une année de stage avec des doctorants via MARMAM, une newsletter en biologie marine gratuite en anglais avec énormément de proposition de stages que je vous invite vivement à rejoindre !

Je suis partie à Madère, Hawaii, en Australie et en Islande la première année puis je suis retournée 1 ans et demi en Australie avant de rentrer en Suisse dépitée parce que je n'avais pas réussi à obtenir de visa en Australie et donc pas de travail.

Lors de cette première année de formation, je me suis auto financée pendant 1 an. J'ai payé mon logement, mes vols et ma nourriture et j'ai travaillé parfois 12 à 14 jours d'affilés en faisant entre 7 à 14h par jour. La plupart des propositions sur MARMAM sont à notre charge mais certains projets sont avec le logement et même parfois la nourriture.

Ces expériences étaient très intenses et cela m'a permis de faire une idée (assez négative je dois bien l'avouer) sur les thèses (qui dure 5 ans au lieu de 3 et qui demandent énormément d'investissement personnels,) certains thésards n'avaient même plus de joie à voir des dauphins tellement ils avaient de données à analyser.

J'ai par contre vécu des moments incroyables sur l'eau et j'ai adoré regarder la mer et les espèces magnifiques qui y vivaient. J'ai entendu parlé du métier d'observateur des mammifères marins en Australie et qu'on pouvait travailler pour l'industrie et bien gagner sa vie en complément de bénévolat à droite et à gauche.

C'est pourquoi, en 2014 soit 2 ans après, j'ai fait les démarches pour devenir observatrice des mammifère marins. J'ai fait mon brevet JNCC/BOEM en Ecosse et j'ai fait mon Bosiet et certificat Medical à Singapour. J'ai postulé en 2015 chez plusieurs boîtes mais ce n'est que en 2017 que j'ai été contactée pour devenir MMO.

Après j'ai commencé des missions assez régulières en Guyane, en Afrique, en Mer noire, Baltique, en Méditerannée. à Mayotte et dans la Manche mais à chaque fois je devais travailler à côté pour compléter mes revenus. J'ai travaillé principalement pour une compagnie française. Ce travail reste quand même assez instable, c'est pourquoi je recommande d'avoir un back-up et idéalement un autre travail, le temps de rentrer dans le milieu.

Formation JNCC/BOEM

Je recommande fortement de faire une formation JNCC car celles-ci est reconnue casiment partout. Cette formation est dispensée en anglais et va vous expliquer comment mitiguer les travaux lorsque vous êtes en mer.

Moi je l'avais effectuée en Ecosse avec Carolyn Barton qui a l'époque était la seule à la donner. De nos jours et avec le Covid, on peut même suivre la formation en ligne.

Voici deux compagnies que je recommande mais il y en a plein sur le marché.

Seiche ; Carolyn Barton

L'avantage avec Seiche par exemple, c'est qu'ils possèdent une agence de MMO et peuvent vous placer après le cours. Ils font aussi des très bon cours en acoustique sur Pamguard et si vous allez à Dorset vous pouvez peut-être enchainer les 2 formations.

Le Bosiet

Ce certificat est pour travailler en haute mer et inclus une formation crash d'hélicopter HUET et Ca EBS. La formation dure 3-4 jours et il est important qu'elle soit reconnue OPITO (c'est une certification qui est valide casiment partout). Vous trouverez une liste des établissement pour faire le bosiet ici, mais il existe aussi des sites spécialisé en Italie (Ravenna et Pavie) et récemment j'ai fait mon refresh FOET à Dunkerque.

Je ferai un article plus précis sur ce qu'est le BOSIET et comment s'y préparer.

Certificat Medical OGUK

Ce certificat medical est souvent demandé et est a effectué dans des endroits spéciaux.

On vous testera l'ouïe, la vue, parfois il a des test de drogues via l'urine et des tests réflexes aussi. Suivant les compagnies les tests STCW sont aussi reconnu mais pour travailler en mer du Nord par exemple, il vous faudra le OGUK.

Savoir l'anglais

Hé oui, si vous voulez être un observateur des mammifères marins c'est mieux de savoir l'anglais. Déjà pour faire les certificats et les cours... mais aussi pour pouvoir communiquer à bord. Je ne connais qu'une compagnie qui est 100% française c'est Ifremer, pour tout le reste, en général, les personnels à bords parlent anglais. Si vous êtes allemand, je pense qu'il doit y avoir des compagnies pour la recherche allemande, pareil pour les espagnols et italiens mais en globalité l'anglais est la langue universelle à bord.

Avoir les moyens

Ces certificats sont en général payés par les grosses boîtes comme Total, Shell, EDF, Vatenfall etc pour leurs employés.

Nous, malheureusement, en tant qu'observateur indépendant on doit se les payer et cela représente un investissement non négligeable. Alors certes une fois à bord on est bien payé (de 100 euros à 300 euros pour un MMO expérimenté) mais avant il faut faire cet investissement sans savoir si on sera pris ou pas.

Une technique pourrais être de faire son JNCC et ces stages avant et de s'inscrire au BOSIET juste avant de faire son premier contrat. Seulement le premier contrat peut se faire dernière minute (1 semaine avant) donc c'est à réfléchir.

Matériel d'un MMO

Suivant les compagnies le matériel est fournit, mais le problème c'est que souvent le matériel n'arrive pas à temps, c'est pourquoi il faut s'équipper de :

- jumelles (et c'est mieux d'investir 200 à 500 euros dans des bonnes jumelles)

- d'un ordinateur (avec excel)

- d'un appareil photo avec un grand zoom.

Il faut aussi des chaussures de sécurités casi sur toutes les missions même si souvent on reste au pont.

aussi parfois on nous demande un passeport de marin, et là c'est entre 300 à 700 euros à rajouter.

Etre indépendant

Au début de ma carrière j'étais engagée par une boîte en tant qu'employée, je gagnais au final très peu (entre 80 à 120 euros) par jour et je coutais très cher à mon employeur français qui avait tout intérêt à engager d'autres personnes. C'est pourquoi je recommande de passer à un statut d'indépendant le plus vite possible car souvent les agences ne prennent pas d'employés mais veulent des freelances (comme ça ils n'ont pas a payer les charges salariales).

Et qui dit indépendant dit que nous devons avoir notre propre assurances profesionnelles, donc cela est aussi à prévoir avant son premier contrat. La Maif a été d'accord de m'assurer mais cela n'a pas été si simple de trouver une assurance qui voulait bien le faire.

Etre flexible

Je ne compte plus le nombre de fois ou j'ai su la date du départ 4 jours avant, que j'ai signé mon contrat le jour du départ ou même après la mission, que j'ai reçu le protocole le jour même etc. Ce qu'il est très important surtout lorsqu'on débute c'est de ne pas accepter n'importe quoi mais de rester flexible. Souvent à bord la mission ne se déroule pas comme prévu, c'est normal ça fait partie du jeu.

Pour bien débuter, choses avec lesquelles il faut être vigilants:

Pour débuter je recommanderai vraiment d'être avec quelqu'un d'expérience, ne serais-ce que pour apprendre les codes du bateau et le B à Ba. N'acceptez pas une mission ou vous serez tout-e seul-e surtout si vous n'avez jamais fait de mission embarquée. Ca sera beaucoup de stress et je pense pas aussi qualitatif comme travail.

Une mission normale en sismique par exemple comprend un MMO lead et 2 MMOs et souvent il y a aussi 2 opérateurs PAM. De quoi apprendre en douceur avec des collègues comment bien faire son travail.

Vous pouvez aussi demandez des références sur les personnes avec qui vous allez travailler, prendre contact avec eux avant le début du voyage et regardez quels sont les avis sur la compagnie qui vous employe.

Aussi la compagnie doit vous défrayer porte à porte pour les vols et les hôtels. N'acceptez pas d'avancer l'argent surtout si vous ne connaissez pas la compagnie. J'ai des amis qui ont perdus de l'argent en acceptant des missions comme cela et ils n'ont jamais été payés ou même remboursés.

Par contre il est commun de payer ses repas et parfois les hôtels. A ce moment la gardez bien les tickets, car vous devrez tout envoyer à la fin de la mission pour être remboursé.

Ne pas avoir le mal de mer et l'angoisse de ne plus voir la terre

On peut tous être sujet au mal de mer mais certaines personnes sont très sensibles et clairement ce métier demande une grande présence du lever du soleil au coucher.

C'est ok de prendre des pastilles au début mais durant 6 semaines ça peut être très très long et le bateau ne vous ramènera pas au port.

Je me rappelle qu'à ma première longue mission j'étais inquiète de ne plus pouvoir voir la terre, mais très vite j'ai adoré ce sentiment d'infinité. Après je pense que cela dépend de chaque personne et si vous avez le mal de mer par mer très calme, je dirai que c'est un peu compromis pour faire ce métier.

Etre ok de partager sa cabine et vivre en communauté

Une dernière chose auxquel on ne pense pas forcément mais qui peuvent déranger certaine personnes, c'est que, à bord on partage souvent sa cabine et sa douche. Il faut donc être ok avec la promiscuité. Après c'est aussi possible d'avoir sa propre cabine mais c'est plus rare et cela dépend des projets.

Voila j'espère que ces informations vous auront été utiles, n'hésitez pas si vous avez des questions.

Ps: nous sommes déjà un petit groupe d'amis observateurs, si vous avez de l'expérience en mer, n'hésitez pas à m'envoyer votre CV, on fera peut-être appel à vous si on a une grande mission.

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